⛳ Cette Cour Juge Les Crimes En France
JUSTICE- Il était le premier à comparaître devant une cour criminelle, nouvelle juridiction permettant de juger des crimes sans jury populaire.Un homme de 36 ans a été condamné ce jeudi 5
LaCour suprême du Canada aura sa première juge autochtone. Le premier ministre Justin Trudeau a proposé la nomination de Michelle O’Bonsawin, qui est aussi « parfaitement bilingue ».
Quantau président de la Conférence des juges de la Cour du Québec, le juge Serge Champoux, il a même démissionné de son poste en mai en protestant contre cette
Aujourdhui et demain, au palais de justice de Paris, se tiennent les premières journées internationales du pôle crime de guerre et crime contre l'humanité qui a été créé en 2012. Et permet à la France d'enquêter et juger dans certaines conditions de certain crime de guerre. Cette journée internationale permet également de confronter les expériences et les
Cettecour expérimentale juge les crimes punis de 15 à 20 ans sans jury populaire mais avec cinq magistrats professionnels contre trois (et un jury) lors de procès d’assises; une étape
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LaCour pénale internationale a ouvert une enquête sur les crimes de guerre présumés commis par la Russie dans le cadre de l'invasion de l'Ukraine. Cela a été annoncé par l'un des juges d
Crimesde guerre en Syrie : la justice tente de réhabiliter la compétence universelle en France. La Cour de cassation avait considérablement réduit, en novembre 2021, les possibilités de
LaFondation Frantz Fanon a suivi le processus de la demande déposée à la CPI et soutient pleinement cette démarche.
MiL3nFM. Comment déposer une demande de mise en liberté ? Quel est le juge compétent pour prononcer la remise en liberté ? Quels sont les recours contre un refus de remise en liberté ? Qu’est-ce que le référé détention ? La remise en liberté peut-elle être ordonnée pour raison de santé ? Une personne mise en examen c’est-à-dire une personne à l’encontre de laquelle il existe, selon le juge d’instruction, des indices graves ou concordants laissant présumer qu’elle a participé, comme auteur ou complice, à la réalisation d’un crime ou d’un délit peut être placée en détention provisoire Dans les conditions prévues par la loi [1] Pour une durée limitée [2] Voir brève sur la détention provisoire. Il se peut néanmoins qu’elle soit remise en liberté, soit à sa demande soit à l’initiative du juge d’instruction ou du Procureur de République. I. La demande de mise en liberté de la personne détenue provisoirement. La personne placée en détention provisoire ou son avocat peut, à tout moment, demander sa mise en liberté [3]. Le rôle de l’avocat pénaliste est alors double Il doit construire un solide dossier pour la demande de mise en liberté, constitué le plus souvent d’une promesse d’embauche et d’une attestation d’hébergement. Pour ce faire, il doit devenir l’intermédiaire entre son client et les proches et employeurs de ce dernier. Sur la base de ce dossier, il doit rédiger un mémoire de demande de mise en liberté, afin que les chances de réussite soient les meilleures. Cette demande est adressée au Juge d’instruction. En pratique, le détenu peut également effectuer sa demande de mise en liberté par déclaration auprès du chef de l’établissement pénitentiaire, qui la transmet à la juridiction. Le juge d’instruction communique immédiatement le dossier au Procureur de la République afin que ce dernier puisse prendre ses réquisitions. Le juge d’instruction a alors deux possibilités Soit le Juge d’instruction donne une suite favorable à la demande, Soit il transmet le dossier et son avis motivé au juge des libertés et de la détention, dans les cinq jours suivant la communication au Procureur de la République. Le juge des libertés et de la détention doit ensuite statuer dans un délai de trois jours. S’il ne statue pas dans ce délai, il est possible de saisir directement la chambre de l’instruction de la demande de mise en liberté. La chambre de l’instruction dispose alors d’un délai de 20 jours pour statuer. Si ce délai n’est pas respecté, la personne est automatiquement remise en liberté. La mise en liberté de la personne placée en détention provisoire doit être ordonnée dans deux cas Lorsque les conditions de mise en détention provisoire ne sont plus remplies, Lorsque la détention provisoire excède une durée raisonnable. La mise en liberté, lorsqu’elle est accordée, peut être assortie de mesures de contrôle judiciaire. Si une personne est détenue en exécution d’une condamnation et qu’elle forme appel de cette décision de condamnation, elle demeure détenue sous le régime de la détention provisoire et peut former des demandes de mise en liberté, jusqu’à l’audience devant la cour d’appel, selon les modalités des articles 148-1 et 148-2 du Code de Procédure pénale [4]. II. La mise en liberté à l’initiative du juge d’instruction ou du Procureur de la République. La mise en liberté peut être ordonnée d’office par le juge d’instruction, après avis du Procureur de la République [5]. Le Procureur de la République peut également la requérir à tout moment. Le juge d’instruction peut alors soit ordonner la mise en liberté de la personne, soit, dans les cinq jours suivant les réquisitions du Procureur de la République, transmettre le dossier et son avis motivé, au Juge des libertés et de la détention, qui statue dans un délai de trois jours [6]. Une fois de plus, la mise en liberté de la personne placée en détention provisoire doit être ordonnée lorsque les conditions de mise en détention provisoire ne sont plus remplies et/ou lorsque la détention provisoire excède une durée raisonnable. Quand elle est accordée, la mise en liberté peut être assortie de mesures de contrôle judiciaire. III. La remise en liberté en raison de l’état de santé du détenu. Lorsqu’il n’existe pas de risque grave de renouvellement de l’infraction, la mise en liberté d’une personne placée en détention provisoire peut être ordonnée, d’office ou à la demande de l’intéressé, lorsqu’une expertise médicale établit que cette personne est atteinte d’une pathologie engageant le pronostic vital ou que son état de santé physique ou mentale est incompatible avec le maintien en détention [7]. IV. L’appel des ordonnances de refus de mise en liberté. L’appel des ordonnances de refus de mise en liberté se fait auprès de la chambre de l’instruction, dans un délai de dix jours à compter de la notification ou de la signification de la décision [8]. En pratique, la personne en détention provisoire peut interjeter appel de l’ordonnance de refus de mise en liberté en s’adressant au chef de son établissement pénitentiaire, qui transmet cette demande au greffe de la juridiction qui a rendu la décision. Son avocat peut également interjeter appel directement par déclaration auprès du greffe de la juridiction qui a rendu la décision [9]. V. Le référé-détention. Lorsqu’une ordonnance de mise en liberté d’une personne placée en détention provisoire est rendue contrairement aux réquisitions du Procureur de la République, ce dernier dispose d’un délai de quatre heures, pendant lequel la personne n’est pas remise en liberté, pour former appel de l’ordonnance devant le Juge d’instruction ou le Juge des libertés et de la détention, et pour saisir dans le même temps le premier président de la cour d’appel d’un référé-détention, c’est-à-dire que si ce dernier l’estime nécessaire, il peut ordonner la suspension de la mise en liberté et donc le maintien en détention jusqu’à ce que la chambre de l’instruction statue sur l’appel du Procureur de la République dans un délai maximal de dix jours. Le premier président de la cour d’appel doit statuer au plus tard le deuxième jour ouvrable suivant la demande. Pendant ce délai, les effets de l’ordonnance de mise en liberté sont suspendus et la personne reste en détention [10]. Recommandez-vous cet article ? Donnez une note de 1 à 5 à cet article L’avez-vous apprécié ? Notes de l'article [1] articles 143-1 et suivants du Code de procédure pénale [2] articles 145-1 et suivants du Code de procédure pénale [3] article 148 du Code de procédure pénale [4] article 367 du Code de procédure pénale en matière criminelle et article 498-1 en matière correctionnelle [5] article 147 du Code de procédure pénale [6] article 147 du Code de procédure pénale [7] article 147-1 du Code de procédure pénale [8] article 186 du Code de procédure pénale [9] articles 502 et 503 du Code de procédure pénale [10] article 187-3 du Code de procédure pénale
Résumé Index Plan Texte Notes Citation Auteur Résumés Toutes les statistiques balayant le xixe siècle en France convergent le dimorphisme sexuel en matière de crime est incontestable. Entre 1811 et 1914, en Haute-Garonne, les femmes représentent seulement 16 % des individus qui ont fait l’objet d’une instruction. Cette différenciation sexuée n’est pas que quantitative. Hommes et femmes ne comparaissent pas nécessairement pour les mêmes crimes. Les statistiques, réalisées à partir des arrêts de la cour d’assises de la Haute-Garonne, semblent corroborer une criminalité spécifique en fonction du sexe de l’accusé. Mais, la construction des données chiffrées est à contextualiser. Et la dimension genrée de la criminalité est à étudier. Nous proposerons des pistes de réflexion. All the statistics concerning nineteenth-century France converge sexual dimorphism in crime matters is unquestionable. In the Haute-Garonne, women represented only 16 % of individuals who were under investigation between 1811 and 1914. This gendered differentiation is not only quantitative but qualitative as well men and women did not commit the same crimes. The statistics gathered from the Haute-Garonne Court of Assize seems to corroborate the existence of specific crimes according to the sex of the defendant. But the data must be analyzed further in context. And the gendered character of crimes is to be studied. A new line of approach to the subject will be offered. Todas las estadísticas del siglo xix en Francia convergen es indiscutible el dimorfismo sexual, en lo que concierne el crimen. Entre 1811 y 1914, en el departmento de Haute-Garonne, las mujeres representan sólo un 16 % de los individuos que fueron objetos de una instrucción. Esta diferenciación sexuada no sólo es cuantitativa. Los hombres y las mujeres no comparecen necesariamente por los mismos crímenes. Las estadísticas realizadas a partir de las sentencia del tribunal penal de Haute-Garonne parecen corroborar una criminalidad específica según el sexo del acusado. Sin embargo, es imprescindible contextualizar la construcción de los datos cifrados, y estudiar la dimensión de género de la criminalidad, por lo cual propondremos nuevas orientaciones de de page Entrées d’index Haut de page Texte intégral Introduction 1 Michelle Perrot, Ouverture » in Christine Bard, Frédéric Chauvaud, Michelle Perrot, Jacques-Guy P ... 1Toutes les statistiques balayant le xixe siècle en France convergent le dimorphisme sexuel en matière de crime est incontestable. Entre 1811 année qui inaugure l’entrée en vigueur du Code pénal napoléonien et 1914 année qui clôture habituellement le xixe siècle chez les historiens en Haute‑Garonne, 7 088 individus ont fait l’objet d’une accusation, mais les femmes représentent seulement 16 % d’entre eux. Bon an mal an, le cas haut-garonnais se fond dans la moyenne nationale. Évidemment, ces données, construites sur la base des personnes traduites devant la cour d’assises, ne reflètent pas nécessairement la réalité de la criminalité. Surtout, gardons-nous de généralisations dépourvues d’historicité. La faible proportion de la criminalité féminine à l’époque contemporaine n’est pas universelle, ni dans le temps ni dans l’espace. Michelle Perrot1 rappelle la répression massive dont ont été victimes les sorcières aux xvie et xviie siècles. Elle met également en lumière le cas de Stockholm, au début du xviiie siècle, où le taux de criminalité féminine est deux fois plus élevé que celui des hommes, au regard des inculpations comme des condamnations. 2Cette dissymétrie entre hommes et femmes en matière criminelle, en France comme en Haute-Garonne, génère inévitablement une dissymétrie des sources, problème récurrent lorsqu’on se confronte à l’histoire du genre. Cet article vise à présenter des statistiques très générales sur la criminalité en Haute-Garonne au xixe siècle à partir des arrêts de la cour d’assises. Il s’agit, en fait, des jugements rendus. Ils sont compilés dans des volumes reliés. Contrairement aux dossiers d’assises qui contiennent toute l’instruction mais qui sont très lacunaires, les arrêts sont tous conservés dans le département pour le xixe siècle, ce qui facilite la réalisation de statistiques fiables. En deux, trois pages, ils récapitulent l’état civil de l’accusé, le crime pour lequel il est poursuivi et enfin le verdict rendu. Le nom patronymique, les prénoms, voire les surnoms, sont déclinés. Pour les femmes mariées, le nom d’épouse est ajouté, ce qui permet de déceler l’état matrimonial des femmes. Information que nous ne pouvons pas déduire pour les hommes et qui n’est quasiment jamais précisée. Certaines données ne sont pas systématiques, comme la date de naissance ou la profession de l’accusé. D’autres sont moins détaillées en fonction des périodes sessions d’assises comme l’énoncé du crime, en particulier lorsque le prévenu est acquitté. Ainsi, il arrive que la seule information recueillie sur le crime soit un vol, sans savoir dans quelles conditions, ni sans précision sur l’objet du vol. Dans le détail, les statistiques sont donc moins précises. 2 Ces statistiques sont réalisées dans le cadre d’un doctorat portant sur la comparaison des hommes e ... 3Pour finir, ces statistiques sont construites à partir des arrêts, c'est-à-dire à partir des jugements rendus sur des affaires qui ont donc été jugées. Toutes celles qui ont été portées à la connaissance de la justice mais qui, faute de coupable identifié ou faute de charges suffisantes, se sont conclues par un non-lieu ne sont pas comptabilisées. Inutile aussi de parler des crimes non dénoncés qui relèvent de l’infra-judiciaire, de l’arrangement entre soi. En outre, nous nous sommes limitée aux infractions qualifiées de crimes par les magistrats2. 4Quelles hypothèses pouvons-nous émettre pour expliquer la différenciation sexuée en matière de crime, qui émane des statistiques ? Les crimes ont-ils un genre ? 1. Des crimes redéfinis, et donc de moins en moins de criminels, de criminelles 5En comparant criminalité masculine et féminine, le premier constat est que le nombre de criminels, quel que soit le sexe du prévenu, décline au cours du xixe siècle fig. 1. Ce fléchissement tout au long de la deuxième moitié du xixe siècle s’observe aussi au niveau national. Le Compte général de l’administration de la justice criminelle en France révèle qu’entre 1831 et 1880, le rapport du nombre d’accusés à la population est de 17 sur 100 000 habitants, en moyenne, à l’échelle métropolitaine. En Haute-Garonne, il s’élève à 20 mais le département n’est pas classé parmi les départements les plus criminogènes Corse, Seine. 6Comment expliquer cette baisse du nombre de criminels présentés devant la cour d’assises ? Elle est à rapprocher des politiques législative et judiciaire qui ont transformé certains crimes en délits, en écartant notamment les circonstances aggravantes qui convertissaient des délits en crimes. Par exemple, auparavant, un vol commis avec des circonstances aggravantes – effraction, la nuit, dans une maison habitée – était qualifié de crime. La loi du 13 mai 1863, en particulier, défère donc à la juridiction correctionnelle certaines infractions jusqu’alors criminalisées, telles que les coups et blessures ayant entraîné une incapacité de travail de plus de vingt jours, la suppression d’enfant lorsqu’il est établi que ce dernier n’a pas vécu. Dans ce dernier exemple, cela signifie qu’un certains nombre d’infanticides présumés sont déférés devant le tribunal correctionnel. La réforme de 1863 entraîne donc une baisse des effectifs parmi les accusés de crime fig. 1. Cette correctionnalisation est justifiée par la volonté de réprimer davantage. Une répression plus légère, certes, mais plus contrôlée qui évite les acquittements jugés scandaleux » prononcés par les jurys d’assises. Ceux-ci préférant acquitter lorsqu’ils évaluent la peine prévue par le Code pénal disproportionnée par rapport au cas jugé. Et ce, malgré la possibilité depuis 1832, pour les jurys, de reconnaître des circonstances atténuantes qui abaissent d’un degré la peine encourue de la peine de mort vers les travaux forcés à perpétuité, par exemple. Fig. 1. Nombre d’hommes et femmes accusés par périodes quinquennales aux assises de la Haute-Garonne 1811-1914 © Sandrine Pons. 7Le premier crime poursuivi au xixe siècle, sans distinction de sexe, est le vol, en tout cas jusqu’en 1880. À partir de cette décennie, en Haute‑Garonne, les infanticides dominent la criminalité féminine et détrônent définitivement le vol, qui reste le crime prépondérant chez les hommes accusés. Frédéric Chauvaud et Arnaud-Dominique Houte rappellent que 3 Frédéric Chauvaud, Arnaud‑Dominique Houte, Au voleur ! Images et représentations du vol dans la Fra ... Le xixe siècle déteste unanimement les voleurs et les poursuit d’une impitoyable répression. On retrouve l’image, popularisée par Tarde, d’un jury d’assises galant et propriétaire », complaisant à l’égard du crime passionnel mais inflexible devant toute atteinte au portefeuille. Obsession propriétaire » écrit également Michelle Perrot3. 4 Louis Gruel, Pardons et châtiments, Paris, Nathan, 1991, p. 47. 8Les historiens relativisent cette vue d’ensemble, en citant les travaux de Louis Gruel4. Ce dernier souligne que les vols sont souvent commis en récidive, et qu’en qualifiant l’infraction, les magistrats filtrent en amont des assises, d’où des taux d’acquittement assez bas. La correctionnalisation affecte surtout les vols, dans la seconde moitié du xixe siècle, comme en témoigne la figure 2. Et, une grande partie des vols commis par les femmes est correctionnalisée, ce qui explique la chute des poursuites pour vols aux assises les concernant, à partir de la décennie 1860 fig. 2. Fig. 2. Hommes et femmes accusés de vol et tentative de vol en Haute-Garonne par décennie 1811-1914 © Sandrine Pons. 5 Vol commis par un domestique ou un homme de service à gages même lorsqu’il est commis envers une pe ... 9Sur toute la période 1811-1914, 33 % des vols dont la nature est connue et impliquant des femmes sont des vols domestiques5 qui représentent seulement 13 % des vols jugés chez les hommes. Ces derniers sont poursuivis d’abord, à 43 %, pour des vols d’argent. Cependant, il arrive souvent qu’un même voleur ait plusieurs cibles et commette des vols de natures différentes, emportant argent, objets, nourriture. Sans surprise, les femmes jugées pour vol sont principalement des domestiques qui habitent une commune urbaine %, où le personnel ancillaire est le plus recherché fig. 3. Alors que les hommes jugés pour vol sont très rarement des domestiques fig. 4. Tout vol confondu, 68 % des femmes et 53 % des hommes inculpés sont domiciliés dans les communes urbaines, dans un département majoritairement rural au xixe siècle. 10Les criminelles exerçant des professions très féminisées, comme la domesticité, sont surreprésentées dans les affaires de vol. Ainsi la criminalité n’est-elle pas liée à l’opportunité, et le confinement de certaines femmes dans la sphère privée ne les protège-t-il pas ? Ou bien, ces domestiques exerçant dans les villes, coupées de leurs attaches familiales, ne sont-elles pas des cibles plus vulnérables pour les autorités ? La même question pourrait être posée à propos des hommes poursuivis pour vol dont la quasi-moitié sont des artisans commerçants graph. 4, plutôt citadins et dont la profession peut exiger une grande mobilité. 6 Michelle Perrot, Philippe Robert, Le compte général de l’administration de la justice criminelle en ... 11À noter que % des hommes présentés devant les assises pour vol sont des sans domicile fixe, appelés vagabonds à cette époque, sûrement réduits au vol par nécessité seules 9 femmes jugées sont dans ce cas sur tout le xixe siècle mais très mal perçus dans les représentations collectives. D’Haussonville, avocat et essayiste, auteur en 1879 d’un ouvrage sur l’Enfance à Paris, les qualifie de criminels d’habitude » qu’il distingue des criminels d’accident qui font du vol une profession6. 12Ajoutons que l’association criminelle est une pratique plus répandue chez les hommes. % des accusés sont soupçonnés d’avoir commis un vol avec des complices du sexe opposé, % des femmes et 23 % des hommes se sont risqués à un vol en réunion avec un ou des comparse-s du même sexe. Les circonstances du passage à l’acte peuvent éclairer ces chiffres. Fig. 3. Catégories socioprofessionnelles des femmes accusées de vol 1811-1914 © Sandrine Pons. Fig. 4. Catégories socioprofessionnelles des hommes accusés de vol 1811-1914 © Sandrine Pons. 13Même si le vol est, dans la plus grande partie du xixe siècle, le crime le plus jugé, et qu’il est principalement perpétré dans les villes, il prend des formes différentes en fonction du sexe des accusés. 2. Les crimes dits spécifiques une construction de la criminalité féminine et masculine ? 7 Ce que nous avons qualifié de crimes spécifiques » sont les crimes associés quasi exclusivement a ... 14En matière de crime et plus particulièrement certains crimes, on le sait, la différenciation de sexe est forte. Ainsi, les crimes dits féminins sont souvent mis en lumière d’autant que quantitativement les femmes sont minoritaires devant les cours d’assises ou dans les prisons. On entend beaucoup moins parler de crimes masculins », crime et masculin semblant aller de soi, alors que la criminalité au féminin est associée à l’exception, et a ainsi suscité l’intérêt des premiers criminologues, tel Lombroso. Les statistiques tendent à corroborer une criminalité spécifique7 » en fonction du sexe du présumé criminel, qui ne fait que refléter pourtant les normes, définies par une société à un temps donné, et le respect ou les résistances que ces normes suscitent. Les statistiques ne sont pas nécessairement un miroir des réalités sociales et des réalités criminelles, d’autant que la notion de crime est variable d’un espace, d’une époque à l’autre. Au xixe siècle, au sommet de la hiérarchie des crimes, se situe le parricide, crime suprême qui offense la figure du père, consacrée par le Code civil, et autour de laquelle toute la société est construite la société patriarcale. Les seuils du tolérable et même de l’imaginable sont à historiser. 8 Anne-Claude Ambroise-Rendu, Attentats à la pudeur sur enfants le crime sans violence est-il un ... 9 Georges Vigarello, Histoire du viol, xvie-xixe siècles, Paris, Seuil, 1998. 15Certains crimes ne sont même pas envisageables. Ainsi, en Haute-Garonne, entre 1811 et 1914, aucune femme n’est poursuivie pour viol. Les statistiques enseignent que seuls des hommes sont inculpés pour cette infraction, les présumés violeurs représentent 2 % de l’ensemble des accusés sur toute la période étudiée avec une hausse de poursuites entre 1831-1880. On sait que ce crime est, en plus, rarement dénoncé, difficile à prouver, et les victimes recensées sont quasi exclusivement des jeunes femmes, des adultes. Lorsque les violences sexuelles sont exercées sur des enfants, même dans des cas avérés de viols, la justice poursuit souvent l’agresseur pour attentat à la pudeur, terme qui, comme le note Anne‑Claude Ambroise‑Rendu, a pour effet d’associer la victime et l’agresseur dans la même réprobation morale et » Et Georges Vigarello a montré que le viol est perçu non comme une perte de soi, au xixe siècle, mais comme une souillure sociale, centrée sur la crainte que la victime soit initiée à des apprentissages pervers9. Trois femmes sont poursuivies pour attentats à la pudeur sur enfants pour tout le xixe siècle, dans notre département, mais la lecture des dossiers d’assises révèle que ce sont en fait des viols. En miroir, 483 hommes sont accusés pour la même infraction, soit % des hommes jugés, particulièrement entre les décennies 1850 et 1880. La loi de 1832 ajoute l’attentat à la pudeur sans violence pour les moins de 11 ans, âge qui est relevé à 15 ans en 1863, ce qui peut expliquer en partie une hausse d’inculpations entre 1850 et 1880. Le Compte général de l’administration de la justice criminelle en France, qui comptabilise viols et attentats à la pudeur dans la même rubrique, note une hausse continue sur le siècle. En Haute-Garonne, 73 % des accusés d’attentats à la pudeur et % des accusés de viol sont originaires de communes rurales. Il semble que la communauté villageoise exerce un contrôle plus grand sur les membres qui la composent, elle est plus vigilante qu’en ville où l’anonymat est la règle. De plus, rappelons que le département est majoritairement rural. 16Les viols et attentats à la pudeur apparaissent, à quelques exceptions près, comme des crimes masculins, au regard des statistiques. En Haute-Garonne, au xixe siècle, les crimes politiques jugés rébellion, insultes contre le roi, complot contre la sûreté de l’État, et le délit de presse, qui est jugé aux assises sont aussi le fait d’une écrasante majorité d’hommes. En effet, seules 6 femmes sont poursuivies pour de telles infractions, en particulier 2 en 1831, vraisemblablement en lien avec les Trois glorieuses, la Révolution de 1830. 4 sont acquittées et 2 condamnées à la prison. Ce sont des rurales. % de l’ensemble des hommes accusés entre 1811 et 1914 dans le département sont inculpés pour des crimes politiques. Et 87 % de ceux-là le sont pendant la première moitié du xixe siècle, période qui connaît deux révolutions, des bouleversements politiques. Ils sont plutôt issus de milieu urbain. 12 % sont impliqués dans un délit de presse, en tant que journaliste ou gérant de journal. Notons pour finir que ces trois derniers crimes – viol, attentat à la pudeur, crime de nature politique – n'impliquant quasiment que des hommes, représentent une proportion faible des criminels de sexe masculin. Fig. 5. Nature des crimes masculins jugés en Haute-Garonne 1811-1914, en chiffres absolus © Sandrine Pons. 17Après les crimes dits masculins, leur corollaire, les crimes dits féminins. Des statistiques réalisées à partir des arrêts, trois en émanent, qui dans l’ordre d’importance quantitative sont les infanticides, les avortements et deux castrations dont une est une tentative. Dans le dernier cité, les faits sont très rares – du moins très rarement jugés –, 25 dans toute la France entre 1826 et 1880, un par an donc en moyenne. Le Compte général de l’administration de la justice criminelle en France ne met pas en parallèle un type de crime avec le sexe des prévenus, il est ainsi impossible de savoir s’il s’agit d’auteurs exclusivement féminins. Dans notre département, c’est le cas. La particularité des crimes féminins au regard des statistiques, c’est qu’ils représentent une grande part de la criminalité féminine, contrairement aux crimes dits spécifiquement masculins fig. 5 et 6. Fig. 6. Nature des crimes féminins jugés en Haute-Garonne 1811-1914, en chiffres absolus © Sandrine Pons. 10 Nicolas Bourgoin, Les chiffres du crime. Statistiques criminelles et contrôle social France, 1825- ... 18Les infanticides sont inclus dans les homicides % entre 1811 et 1849 et 81 % entre 1850 et 1914 des homicides sont des infanticides. Le nombre d’infanticides jugés augmente dans la 2e moitié du xixe siècle, tendance qui se vérifie à l’échelle nationale. Nicolas Bourgoin associe cette progression des accusations d’infanticide à une plus forte sensibilité de la société à cette forme de violence, liée à une chute de la mortalité infantile à la fin du xviiie siècle. Et cela se traduit dans la seconde moitié du xixe siècle par une vague de lois sur la protection de l’enfance10. Notons que 16 hommes sont poursuivis entre 1811 et 1914 pour un tel crime et que 4 d’entre eux comparaissent pour ces faits au côté d’une femme. Nous ne connaissons le lieu d’habitation que pour 13 accusés, les 13 sont ruraux exerçant une profession agricole, âgés surtout entre 30 et 55 ans. L’état civil ne permet pas de déterminer leur statut marital comme c’est possible pour les femmes dont l’identité est modifiée par l’acte du mariage. Les infanticides perpétrés par des hommes sont donc rarement jugés ; sont-ils rarement commis ? Concernant les femmes infanticides, 78 % d’entre elles sont issues d’une commune rurale, dans laquelle les voisins s’épient, sont attentifs aux ventres des femmes. 60 % sont ménagères ou cultivatrices. Sans surprise, la plupart des accusées 70 % sont célibataires et cherchent donc, en commettant un homicide sur leur enfant nouveau-né, à effacer ce qui est considéré comme une faute, une tache indélébile sur l’honneur, un enfant illégitime. 11 C’est la thèse d’Agnès Fine. Agnès Fine, Savoirs sur le corps et procédés abortifs au xixe siècle ... 19L’autre crime féminin » par excellence est l’avortement. Le Code pénal de 1810 punit l’avorteur et l’avortée. L’avortement n’est quasiment pas jugé aux assises de Toulouse pendant la 1ère moitié du xixe siècle 4 uniquement ni dans le reste de la France entre 12 et 48 accusés entre 1826 et 1850. Pendant la décennie 1850-1860, 30 femmes sont jugées pour avortement, il s’agit du plus haut pic au xixe siècle, elles sont en moyenne une dizaine par décennie jusqu’en 1914. Ce sont surtout des sages-femmes %, des ménagères %, plutôt citadines. Un tiers ont entre 26 et 30 ans. La proportion de célibataires et de mariées est à peu près égale. 25 hommes sont poursuivis pour avortement, 8 d’entre eux exerçant des professions médicales. Il est très difficile au xixe siècle de distinguer un avortement d’une fausse couche spontanée, médecins et juristes se plaignent du manque de signes cliniques prouvant irréfutablement l’infraction, ce qui explique la faible part des poursuites. Si le nombre d’avortements jugés augmente dans la deuxième moitié du xixe siècle, c’est peut-être parce que des méthodes abortives, pratiquées par des tiers médecins, sages-femmes, officiers de santé formés au savoir obstétrical se diffusent à partir de 1830-1840 seringue à matrice, sondes artisanales comme des aiguilles à tricoter. Et une indiscrétion, une erreur d’adresse, une vengeance peuvent mettre à jour des pratiques clandestines effectuées contre paiement11. 12 Aude Fauvel a étudié les viols commis par des femmes à cette époque. Aude Fauvel, Les femmes viol ... 20Les crimes spécifiques » quasi exclusivement perpétrés par des hommes ou bien par des femmes sont liés au genre, à la bi-catégorisation de la société qui impose des rôles bien définis aux hommes et aux femmes. Pourtant, le Code pénal est universel, il s’adresse indifféremment à des sujets de droit sans distinguer le sexe des accusés. Par exemple, il ne désigne pas nominativement la mère comme coupable de l’infanticide, ni un individu de sexe masculin comme responsable d’un viol, d’un attentat à la pudeur. Et d’ailleurs, des infanticides perpétrés par des hommes sont jugés et des attentats à la pudeur commis par des femmes aussi, même s’ils le sont en faible proportion. Seuls les viols au féminin sont absents en Haute-Garonne, au xixe siècle ; ils existent pourtant, mais il semble ici qu’on approche un tabou, à mettre sûrement en relation avec le fameux instinct maternel, très invoqué au xixe siècle, siècle de la naturalisation12. Notons enfin que l’infanticide et l’avortement désignés comme les crimes féminins » par excellence, parce qu’ils sont associés au corps féminin, renvoient le plus souvent à l’isolement des femmes qui assument seules une grossesse non désirée ou, pire, qui subissent seules les effets d’agressions sexuelles tues. 13 Anne‑Marie Sohn, Sois un homme ! » La construction de la masculinité au xixe siècle, Paris, Seuil ... 21Les crimes perçus comme spécifiques en fonction du sexe de l’auteur, au regard des statistiques, reflètent davantage la construction de la criminalité. La définition du crime est mouvante, les sensibilités, les représentations évoluent, nous l’avons vu, et tout cela a des répercussions sur les chiffres de la criminalité. Les statistiques réalisées à partir des arrêts d’assises nous dévoilent ce que la société admet comme criminalité, ce qu’elle est prête à accepter et à poursuivre en fonction de ses valeurs, de ses sensibilités, de sa morale et de ses obsessions du moment. Qui plus est, nous étudions des chiffres construits sur le nombre d’accusés jugés, ce qui signifie que toute une part de la criminalité nous échappe. De plus, ce qui est désigné comme crime par l’État et le Code pénal de 1810 peut dans certaines circonstances sembler légitime à la population qui ne dénonce pas certains faits. Nos données sont donc biaisées, filtrées. Les femmes criminelles sont rares, et surreprésentées dans des crimes dits féminins. Sont-elles plus malignes pour échapper aux crimes dits masculins ? Ou, plus vraisemblablement, sont-elles moins recherchées par les forces de l’ordre qui ont intériorisé des stéréotypes de genre associant femmes et douceur, candeur ? Autrement dit, une grande part de la criminalité féminine est-elle occultée ? Commettent-elles en réalité moins de crimes que les hommes ? Est-ce que leur éducation différenciée de celle des garçons et tournée vers la sphère privée, familiale, a des répercussions sur leur vie sociale, au point de canaliser davantage des accès de violence ou des pulsions sexuelles encouragés, au contraire, dans l’apprentissage des garçons ? C’est un élément à prendre en compte dans la compréhension de la différenciation mais il est trop général pour refléter toute la réalité. L’éducation n’est pas la même selon les milieux sociaux, et Anne‑Marie Sohn distingue la jeunesse rurale, la jeunesse des écoles élite de demain, et la jeunesse ouvrière. La masculinité n’est pas uniforme et l’historienne montre que le xixe siècle voit le déclin d’une masculinité fondée sur la force, le courage et l’honneur13 » et qu’émerge en parallèle une masculinité basée sur la parole, la compétence et la médiation. 22En fait, au xixe siècle, la criminalité reste associée au masculin. Les femmes sont-elles cantonnées à une criminalité qui se veut spécifique ? 3. Les homicides, une entrée pertinente pour l’étude genrée du crime et des criminels ? 23Que ce soit les vols ou les crimes dits spécifiques, associés à l’un ou l’autre sexe, l’asymétrie entre hommes et femmes est grande, tant sur le plan quantitatif que qualitatif. Pour comparer de façon équitable hommes et femmes devant la justice, c'est-à-dire réunir quasiment autant d’affaires impliquant les représentants des deux sexes, et donc rassembler un corpus de sources équivalent, et cela en s’émancipant des catégories prédéfinies tels les crimes dits spécifiques, la seule solution, nous semble-t-il, est d’étudier les homicides au sens large incluant les tentatives d’homicide. 14 L’avortement n’est pas classé comme homicide par le Code pénal et par les médecins légistes tel Amb ... 24L’homicide est le meurtre d’une personne vivante, avec ou sans préméditation. Le Code pénal de 1810 liste, entre les articles 295 à 304, les homicides en les subdivisant en meurtre, assassinat, parricide, infanticide et empoisonnement. À ces trois derniers homicides sont conférés des spécificités liées à l’identité de la victime ou au moyen de tuer. Ils n’en restent pas moins au minima des meurtres. Écarter les infanticides au titre qu’ils constitueraient un crime spécifique » revient à nier ces homicides où la grande majorité des accusés sont des femmes mais pas uniquement. Les statistiques criminelles déduites des arrêts d’assises reflètent une criminalité construite. Ainsi, seules des femmes issues des classes populaires sont traduites devant la justice pour infanticide. Qu’en est-il des femmes issues des classes favorisées ? Et la question peut légitimement se poser pour les hommes. La seule singularité de l’infanticide – au regard de la loi – est la victime, un nouveau-né dénomination floue par ailleurs. Est-ce parce que la personne frappée est fragile et sans défense, que ce crime est traditionnellement considéré comme spécifique » et étudié à part ou bien associé à l’avortement14 dans l’historiographie ? Affirmer que les femmes tuent moins n’est donc pas exactement vrai. 25Si on retient la période 1850-1914, 226 criminels et 186 criminelles comparaissent pour homicide, selon les arrêts dépouillés. L’homicide est le seul crime où l’écart entre hommes et femmes est relativement réduit, tout en étant une des quatre premières infractions commises par les criminels, la deuxième ou la principale à partir de 1880 pour les criminelles. Ainsi, les femmes ne sont pas noyées dans la masse des criminels. 26Les femmes comparaissent principalement pour des infanticides. Au xixe siècle, elles sont également poursuivies pour meurtre ou assassinat chiffres stables par rapport sur tout le siècle, pour des tentatives d’homicide, pour un parricide et des empoisonnements. Ces derniers sont deux fois plus nombreux dans la 1ère partie du siècle voir tableau ci-dessous. Les hommes sont accusés principalement d’assassinats ou de meurtres avec un fléchissement sur la deuxième moitié du siècle, de tentatives d’homicide, et plus rarement d’infanticides, de parricides et d’empoisonnements ces derniers étaient onze fois plus nombreux dans la première moitié de siècle. Les empoisonnements, souvent présentés par la presse comme le crime féminin » par excellence, sont pourtant très rarement jugés en Haute-Garonne, et ils sont deux fois plus perpétrés par les hommes entre 1811 et 1914. Fig. 7. Nombre d’hommes et de femmes accusés en Haute-Garonne pour homicide 1811-1914 © Sandrine Pons. 15 Émile Durkheim, Le suicide, étude de sociologie 1897, PUF, 1983, p. 389. 16 Nicolas Bourgoin, Les chiffres du crime…, op. cit., p. 78. 17 Michel Nassiet, La violence, une histoire sociale. France, xvie-xviiie siècles, Seyssel, Champ Vall ... 27Depuis le xixe siècle, les chercheurs émettent des hypothèses pour justifier la faible part des femmes parmi les meurtriers. Ils mettent bien évidemment les cas d’infanticide de côté. Mais, il est vrai que les femmes poursuivies pour meurtre, en dehors des infanticides, sont rares voir tableau ci-dessus. Émile Durkheim suppose que, si les femmes commettent moins d’homicide, c’est qu’elles ne participent pas de la même manière à la vie collective15 ». Nicolas Bourgoin rejette en partie cette hypothèse en s’appuyant sur les statistiques criminelles postérieures à la deuxième guerre mondiale en France qui confirment la surreprésentation masculine, alors même que les femmes participent davantage à la vie publique16. L’anthropologie peut-elle enrichir la réflexion ? C’est ce que pense Michel Nassiet17, historien de la violence, qui se reporte aux travaux d’Alain Testart après avoir constaté qu’à l’époque moderne, en Europe, les femmes tuaient moins que les hommes et que le mode opératoire était très différent, puisqu’elles n’utilisaient pas d’armes. Cela serait le résultat d’une division sexuelle des tâches de travail reposant sur une structure symbolique qui interdisait aux femmes l’utilisation d’armes tranchantes afin de ne pas mélanger leur sang, celui des menstruations, avec un autre sang. Cette structure serait vivace dans les sociétés rurales à l’époque moderne, l’est-elle encore à l’époque contemporaine ? Conclusion 28Pour mettre à jour les logiques de genre qui traversent l’institution judiciaire, ses acteurs, ses discours, les arrêts constituent une source insuffisante. Ils apportent trop peu d’informations et les statistiques sont construites à partir du sexe des individus, celui enregistré par l’état civil. Les dossiers d’assises qui contiennent toute l’instruction, des procès verbaux constatant le crime rédigés par les forces de l’ordre aux interrogatoires des accusés et des témoins conduits par le juge d’instruction, sont beaucoup plus riches. Les lois du genre y sont plus décelables. 18 Ibid., p. 11. 29À l’universalisme juridique s’oppose une différenciation sexuelle très marquée en matière judiciaire. Cependant, ce n’est pas la seule singularité, la différenciation sociale est aussi à noter. Les accusés présentés devant la cour d’assises de la Haute-Garonne entre 1811 et 1914 sont issus des classes populaires, et cela est d’ailleurs plus marqué pour les femmes que pour les hommes. À partir des métiers déclarés, % des hommes accusés sont issus de la bourgeoisie. Une seule femme se présente rentière et se distingue donc des présumées criminelles. Cela tient en particulier aux restrictions professionnelles auxquelles sont soumises les femmes, ne pouvant ou trop peu exercer de professions libérales, telles que notaire, avocat, assureur ou journaliste, qui sont les catégories socialement supérieures convoquées devant les assises et principalement pour des affaires de faux, de banqueroute frauduleuse, ou de délit de presse. La criminalité serait donc circonscrite aux classes les plus populaires. À ce sujet, Nicolas Bourgoin constate que la pauvreté économique et sociale est moins un facteur de criminalité qu’un facteur de vulnérabilité et de victimisation vis-à-vis de la répression pénale on condamne des personnes plus que des actes18. » 30Nous nous en tenons ici à l’étude statistique des crimes mais les peines prononcées par la cour d’assises méritent aussi d’être analysées au prisme du genre. Les femmes sont plus acquittées que les hommes 41 % contre 32 % sur toute la période mais, on le sait, elles ne bénéficient pas toujours de l’indulgence des jurys, elles peuvent aussi être condamnées avec un surcroît de sévérité. La complexité est donc à étudier. Haut de page Notes 1 Michelle Perrot, Ouverture » in Christine Bard, Frédéric Chauvaud, Michelle Perrot, Jacques-Guy Petit dirs., Femmes et justice pénale, xixe‑xxe siècles, Rennes, PUR, 2002, p. 10 et p. 16. 2 Ces statistiques sont réalisées dans le cadre d’un doctorat portant sur la comparaison des hommes et des femmes ayant été jugés pour homicide au sens large devant la cour d’assises de la Haute-Garonne dans la 2e moitié du xixe siècle. L’analyse des discours des dossiers d’instruction et des comptes-rendus de la presse locale est le cœur du travail. 3 Frédéric Chauvaud, Arnaud‑Dominique Houte, Au voleur ! Images et représentations du vol dans la France contemporaine, Paris, Publications de la Sorbonne, 2014, p. 8. 4 Louis Gruel, Pardons et châtiments, Paris, Nathan, 1991, p. 47. 5 Vol commis par un domestique ou un homme de service à gages même lorsqu’il est commis envers une personne qu’il ne sert pas mais qui se trouvait dans la maison ou l’atelier du maître. 6 Michelle Perrot, Philippe Robert, Le compte général de l’administration de la justice criminelle en France pendant l’année 1880 et rapport relatif aux années 1826 à 1880, Genève-Paris, Slatkine Reprints, 1989, p. 6. 7 Ce que nous avons qualifié de crimes spécifiques » sont les crimes associés quasi exclusivement aux hommes ou bien aux femmes. Ce sont les statistiques criminelles qui font émerger des crimes pour lesquels les hommes ou bien les femmes sont surreprésentés parmi les accusés. 8 Anne-Claude Ambroise-Rendu, Attentats à la pudeur sur enfants le crime sans violence est-il un crime ? 1810-1930 », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 2009, 56-4, p. 165. 9 Georges Vigarello, Histoire du viol, xvie-xixe siècles, Paris, Seuil, 1998. 10 Nicolas Bourgoin, Les chiffres du crime. Statistiques criminelles et contrôle social France, 1825-2006, L’Harmattan, Paris, 2008, p. 56. 11 C’est la thèse d’Agnès Fine. Agnès Fine, Savoirs sur le corps et procédés abortifs au xixe siècle », Communications, 44, 1986, p. 107-136. 12 Aude Fauvel a étudié les viols commis par des femmes à cette époque. Aude Fauvel, Les femmes violeuses existent-elles ? Entre médecine, droit et littérature la naissance d’un tabou dans la France du xixe siècle », in Jean-Jacques Lefrère, Michel Pierssens éds., Crimes et délits, Tusson, Éditions du Lérot, 2012, p. 91-116. 13 Anne‑Marie Sohn, Sois un homme ! » La construction de la masculinité au xixe siècle, Paris, Seuil, 2009, p. 441. 14 L’avortement n’est pas classé comme homicide par le Code pénal et par les médecins légistes tel Ambroise Tardieu voir sa démonstration dans Ambroise Tardieu, Étude médico-légale sur l’infanticide, Paris, B. Baillière et fils, 1868, p. 4. 15 Émile Durkheim, Le suicide, étude de sociologie 1897, PUF, 1983, p. 389. 16 Nicolas Bourgoin, Les chiffres du crime…, op. cit., p. 78. 17 Michel Nassiet, La violence, une histoire sociale. France, xvie-xviiie siècles, Seyssel, Champ Vallon, 2011, p. 41 à 46. 18 Ibid., p. de page Table des illustrations Titre Fig. 1. Nombre d’hommes et femmes accusés par périodes quinquennales aux assises de la Haute-Garonne 1811-1914 Crédits © Sandrine Pons. URL Fichier image/png, 28k Titre Fig. 2. Hommes et femmes accusés de vol et tentative de vol en Haute-Garonne par décennie 1811-1914 Crédits © Sandrine Pons. URL Fichier image/png, 87k Titre Fig. 3. Catégories socioprofessionnelles des femmes accusées de vol 1811-1914 Crédits © Sandrine Pons. URL Fichier image/png, 27k Titre Fig. 4. Catégories socioprofessionnelles des hommes accusés de vol 1811-1914 Crédits © Sandrine Pons. URL Fichier image/png, 23k Titre Fig. 5. Nature des crimes masculins jugés en Haute-Garonne 1811-1914, en chiffres absolus Crédits © Sandrine Pons. URL Fichier image/png, 15k Titre Fig. 6. Nature des crimes féminins jugés en Haute-Garonne 1811-1914, en chiffres absolus Crédits © Sandrine Pons. URL Fichier image/png, 13k Titre Fig. 7. Nombre d’hommes et de femmes accusés en Haute-Garonne pour homicide 1811-1914 Crédits © Sandrine Pons. URL Fichier image/png, 3,6k Haut de page Pour citer cet article Référence électronique Sandrine Pons, Les crimes ont-ils un genre ? Étude statistique comparée de la criminalité masculine et féminine en Haute‑Garonne au xixe siècle », Les Cahiers de Framespa [En ligne], 25 2017, mis en ligne le 15 octobre 2017, consulté le 20 août 2022. URL ; DOI de page Auteur Sandrine Pons Sandrine Pons, certifiée d’histoire-géographie, doctorante à l’université Toulouse-Jean Jaurès, FRAMESPA/TESC. Sujet de thèse Codes de loi, codes du genre hommes et femmes devant la cour d’assises de la Haute-Garonne dans la seconde moitié du xixe siècle » Articles du même auteur Paru dans Les Cahiers de Framespa, 29 2018 Paru dans Les Cahiers de Framespa, 25 2017 Haut de page
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